Henri Konan Bédié, décédé le 1ᵉʳ août 2023 à Abidjan, a occupé la fonction de président de la République de la Côte d’Ivoire de 1993 à 1999. Son décès a laissé une empreinte indélébile dans l’histoire de son pays.
Né le 5 mai 1934 dans le village de Dadiékro à Daoukro, situé au cœur de la Côte d’Ivoire, Henri Konan Bédié était issu d’une famille royale et avait huit frères et sœurs. Son père était un cultivateur de cacao. Son parcours éducatif a été marqué par des étapes significatives. Après avoir fréquenté le Collège moderne de Guiglo, suivi de l’École normale de Dabou, il a obtenu son baccalauréat scientifique en 1954. Par la suite, il a poursuivi ses études supérieures à l’illustre Université de Poitiers, en France, où il a successivement décroché sa licence en droit, son diplôme d’études supérieures en économie politique, et son certificat d’aptitude à la profession d’avocat. En 1969, il a brillamment soutenu une thèse de doctorat d’État en sciences économiques. À l’âge de seulement 26 ans, après ses études en France, il est devenu le tout premier ambassadeur de la Côte d’Ivoire aux États-Unis et au Canada, peu après l’accession à l’indépendance du pays en 1960.
Son engagement envers son pays s’est poursuivi lorsqu’il est revenu en Côte d’Ivoire en 1960. Il a occupé divers postes, dont celui de délégué aux affaires économiques et financières de 1966 à 1968, puis ministre de l’Économie et des Finances de 1968 à 1977. De 1980 à 1993, il a été président de l’Assemblée nationale de la Côte d’Ivoire sous le régime du père de l’indépendance ivoirienne, Félix Houphouët-Boigny. Son accession à la présidence de l’Assemblée nationale a eu lieu peu de temps après le décès de Félix Houphouët-Boigny le 7 décembre 1993, conformément à la Constitution.
Au cours de cette période, il a assuré la présidence par intérim jusqu’à la fin du mandat d’Houphouët-Boigny. Cependant, des tensions politiques ont émergé entre le président Bédié et le Premier ministre de l’époque, Alassane Ouattara. En réaction, le président Ouattara a démissionné de son poste de Premier ministre le 9 décembre de la même année. Ensuite, le président Bédié a été élu président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) en avril 1994. Sa présidence s’est caractérisée par des accusations de répression politique et de corruption, ainsi que par la promotion de l’idée de l’ivoirité, qui exigeait que les candidats à la présidence aient des parents d’origine ivoirienne. Cette notion a été utilisée pour exclure Alassane Ouattara de la course présidentielle en 1995, en raison de rumeurs selon lesquelles le père de ce dernier était Burkinabé.
En 1995, Henri Konan Bédié a été réélu avec un soutien massif, obtenant 96,44 % des suffrages. Cependant, sa présidence a été marquée par une grave crise économique qui avait sévi dans le pays depuis les années 1980. Malgré des réformes économiques et des ajustements structurels entrepris de 1990 à 1993, la situation s’est détériorée en raison de la mauvaise gestion et de la corruption. La crise a pris une dimension politique et ethnique liée à l’ivoirité, ce qui a conduit à une mutinerie et à un coup d’État militaire le 24 décembre 1999. Le président Bédié a dû fuir vers une base militaire française avant de quitter la Côte d’Ivoire en hélicoptère le 26 décembre. Il s’est rendu au Togo, accompagné de membres de sa famille, et a ensuite quitté le Togo le 3 janvier 2000 pour se réfugier à Paris le 23 juin 2001.
En 2000, Laurent Gbagbo a été élu président, et il a rencontré Bédié à Paris, l’incitant à revenir en Côte d’Ivoire. Bédié a finalement fait son retour le 15 octobre 2001 pour participer au Forum de réconciliation nationale, soutenu par le PDCI dont il était le président. En 2010, il s’est présenté à l’élection présidentielle, mais est arrivé en troisième position au premier tour. Il a ensuite soutenu la candidature d’Alassane Ouattara, qui a finalement remporté la crise de 2010-2011 et a été réélu en 2015. Cependant, Bédié a retiré son soutien à Ouattara en 2018 et s’est porté candidat à l’élection présidentielle de 2020. Par la suite, il a décidé de boycotter cette élection en raison de la candidature controversée du président sortant, qu’il considérait comme illégale.
Le décès de Henri Konan Bédié est survenu le mardi 1ᵉʳ août 2023 à l’âge de 89 ans, suite à une évacuation d’urgence depuis sa ville natale de Daoukro, où il avait ressenti un malaise. Malheureusement, il n’a pas survécu à la maladie et est décédé à la Polyclinique internationale Sainte-Marie de Cocody.
Le décès de Bédié a marqué la fin d’une ère politique en Côte d’Ivoire. Il était non seulement un homme politique éminent, mais aussi un collectionneur d’objets d’art, un amateur de belles et bonnes choses, et il était à la tête d’une importante fortune personnelle, principalement issue de ses investissements immobiliers en Côte d’Ivoire et en France, ainsi que de ses vastes plantations de café, de cacao et d’hévéas dans différentes régions du pays.
En tant qu’ancien chef d’État, il bénéficiait de privilèges tels que des revenus mensuels et des avantages considérables, notamment des véhicules, une sécurité personnelle et un cabinet. Henri Konan Bédié laisse derrière lui son épouse, Henriette Kagame, ainsi que trois enfants, deux fils et une fille. Durant son mandat présidentiel, il avait également supervisé la construction de bâtiments imposants dans son village natal et la création d’hôpitaux.
Richesse d’Henri Konan Bédié
Selon Jeune Afrique, en tant qu’ancien président ivoirien, le Sphinx de Daoukro recevait une allocation mensuelle de 9,5 millions de F CFA (équivalant à 14500 euros) en vertu de son statut. Auparavant, Henri Konan Bédié, qui a occupé le poste de Ministre de l’Économie et des Finances sous la présidence de feu Félix Houphouët-Boigny de 1966 à 1977, a aussi célébré son immense fortune estimée à 7 milliards de FCFA à cette époque, alors que le miracle ivoirien prenait forme.